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La présidentielle américaine serait dure à truquer

19 octobre 2016, 18:12

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La présidentielle américaine serait dure à truquer

Donald Trump martèle que l'élection présidentielle de novembre sera «truquée», renforçant parmi ses militants l'idée d'une illégitimité de Hillary Clinton quelle que soit l'issue du scrutin. Mais les experts doutent de la possibilité d'une fraude massive.

«Il existe beaucoup de garde-fous en place censés empêcher une telle éventualité, des lois fédérales aux législations locales et à celles des Etats», assure à l'AFP Jo-Renee Formicola, professeure de sciences politiques à l'université Seton Hall.

Le système électoral américain est toutefois loin d'être parfait, comme l'a illustré l'imbroglio du comptage des voix en Floride lors de la présidentielle de 2000 opposant George W. Bush et Al Gore. 

La Cour suprême à majorité conservatrice avait tranché en faveur de Bush, sans effacer l'impression tenace d'une élection volée à Gore, qui avait obtenu plus de voix au plan national.

Mais qu'un tel cas de figure se représente 16 ans plus tard est mathématiquement très improbable, estiment les spécialistes.

Aux Etats-Unis, l'organisation des scrutins -y compris nationaux comme l'élection du 8 novembre- relève quasiment exclusivement des Etats, qui eux-mêmes ont tendance à déléguer aux comtés et aux villes. 

Cela forme une mosaïque où les électeurs votent selon des modes très différents, parfois de façon électronique, parfois avec un bulletin en papier, ce qui offre selon Mme Formicola une garantie anti triche.

«L'hypothèse d'une fraude concernant toutes les circonscriptions électorales est pratiquement impossible justement car il y a toutes sortes de circonscriptions», souligne-t-elle. 

De plus, dans la majorité des Etats clés de la présidentielle 2016, le scrutin sera supervisé par un républicain, le parti de Trump. On peut citer le Colorado, l'Ohio, l'Iowa, le Michigan ou l'Arizona. 

Et, dans chaque bureau de vote, sont théoriquement présents des représentants démocrates et républicains pour s'assurer de l'équité des opérations.

Allégations sans fondement

Aux Etats-Unis «la fraude par substitution d'identité --quand quelqu'un prétend être quelqu'un d'autre-- est incroyablement rare, cela ne se produit quasiment jamais et aucune preuve n'existe qu'elle atteigne un niveau susceptible d'avoir un effet, y compris dans une élection serrée», affirme de son côté Zach Clopton, de la Cornell Law School.

A la traîne dans les sondages sur sa rivale démocrate Hillary Clinton, Donald Trump n'a présenté ni preuves ni détails confortant les allégations de fraudes qu'il avance, se contentant d'évoquer des tricheries localisées dans des bastions de Mme Clinton.

«M. Trump a par exemple cité Philadelphie comme un endroit susceptible d'être le théâtre de triche. (Mais) il n'existe aucune preuve de fraudes commises par des électeurs là-bas», commente à l'AFP M. Clopton.

Les allégations du candidat républicain ont également été balayées mardi par le président Barack Obama.

«Je n'ai jamais vu de ma vie, ou dans l'histoire politique moderne, un candidat à la présidentielle chercher à discréditer les élections et le processus électoral avant que le vote n'ait lieu. C'est sans précédent et ce n'est fondé sur aucun fait», a insisté M. Obama. 

Parmi les autres vulnérabilités identifiées par les spécialistes figurent les piratages de certaines bases de données d'électeurs. De récentes intrusions, attribuées à des hackers russes, ont ainsi été constatées dans les Etats de l'Illinois et de l'Arizona. 

Mais ces alertes ont poussé les autorités fédérales à réagir et à offrir leur assistance aux régions les moins protégées sur le plan informatique.

Le jour du vote, d'autres menaces potentielles existent même si, comme le relève Pamela Smith, présidente de l'organisation Verified Voting, cette élection 2016 offrira davantage de possibilités de contrôler les suffrages a posteriori qu'en 2012 ou 2014.

Maillons faibles mais petites fraudes

Les urnes électroniques, reliées à un réseau éventuellement piratable, pourraient possiblement constituer un maillon faible.

«C'est un éventuel motif d'inquiétude dans les petites villes qui ne disposent pas des sophistications techniques de l'Etat fédéral», estime Zach Clopton. «Mais cela supposerait de pirater de multiples endroits», tempère-t-il.

En définitive, les experts se demandent si Donald Trump, en dénonçant préventivement ces fraudes, ne cherche pas à créer un électrochoc qui lui serait favorable ou encore à s'exonérer d'une défaite redoutée. 

«Il est extrêmement inhabituel de dénoncer des trucages avant même l'ouverture des bureaux de vote», constate Pamela Smith.

«C'est profondément inquiétant, dans le sens où cela pourrait remettre en doute notre système démocratique et le transfert pacifique de pouvoir auquel nous procédons tous les quatre ans.»