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Violences, gaz lacrymogène et coup de feu dans les rues de Charlotte

22 septembre 2016, 16:40

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Violences, gaz lacrymogène et coup de feu dans les rues de Charlotte

Des manifestants lançant des projectiles, la police anti-émeutes répliquant avec du gaz lacrymogène, et tout à coup une détonation qui retentit et un homme qui tombe : la ville américaine de Charlotte vit une nouvelle nuit d'affrontements.

Au bruit, certains s'enfuient en courant. Un photographe de l'AFP a vu l'homme tomber, à deux mètres de lui. Impossible de dire qui a tiré, mais l'espace de quelques instants la violence est suspendue pendant que policiers et manifestants ensemble aident à emmener l'homme blessé par balle hors du périmètre dangereux.

La nuit avait pourtant commencé dans le calme, avec une veillée en mémoire de Keith Scott, un Noir tué mardi par un policier dans des circonstances controversées. Plusieurs familles avaient même amené leurs enfants.

Mais l'atmosphère change brusquement lorsque la manifestation arrive devant le quartier général de la police. Un des manifestants tire le drapeau américain pour le ramener au bas de son poteau, tandis que d'autres frappent à coups de poing sur les grandes portes en scandant «No justice, no peace» («Pas de justice, pas de paix») et «A bas la police».

Lorsqu'ils se retrouvent, quelques mètres plus loin, face à des policiers anti-émeutes bloquant la rue, les manifestants sont déjà en colère.

Certains réagissent encore calmement, comme ces hommes qui lèvent les mains face aux policiers en scandant «On lève les mains, ne tirez pas!», ou cette femme qui, les larmes aux yeux, regarde les policiers en disant «C'est trop, c'est trop».

«Nous avons des frères et des enfants et des pères qui pensent qu'ils risquent de se faire tuer d'un moment à l'autre. Personne ne devrait avoir à vivre comme ça. Tous les Noirs ne sont pas des dealers, des drogués ou des gangsters», proteste-t-elle.

Mais face aux policiers dans leur uniforme anti-émeutes, la violence monte, et bientôt les manifestants, nettement plus nombreux que les policiers, s'emparent de la rue, donnant des coups de pied aux voitures de police, brisant des vitrines, et obligeant les policiers à se réfugier dans le hall d'un hôtel.

Alors que les manifestants tentent en vain d'y entrer, la police finit par réussir à bloquer un périmètre autour de l'hôtel, et quand les manifestants s'approchent trop ou que les projectiles pleuvent, la police répond avec des gaz lacrymogènes, des grenades aveuglantes et en tirant des balles en caoutchouc.

'Mensonge'

«Votre vie est en danger, vous devez vous en aller!», lance un policier aux manifestants qui tentent toujours d'avancer.

C'est dans cette scène de chaos qu'on entend tout à coup un coup de feu. Des gens s'enfuient en courant, on évacue l'homme - grièvement blessé, préciseront plus tard les autorités - laissant sur le trottoir une petite mare de sang.

Cette nouvelle nuit de violence fait suite à la mort mardi de Keith Scott, un père de famille de 43 ans par un policier.

La police a expliqué que Scott était porteur d'une arme et menaçant, et que le policier qui l'a tué est également noir. Celui-ci, a-t-elle précisé, diffusant son nom, a été suspendu.

Faux, répondent ses proches, pour qui Keith Scott ne menaçait personne, et tenait à la main non pas une arme mais un livre. Certains des voisins disent même que le policier qui a tiré était blanc, et non noir.

L'arme «est un mensonge», assurait à l'AFP Taheshia Williams, une résidente du quartier, dont la fille étudie dans la même école que l'un des enfants de Scott.

«Ils ont enlevé le livre et l'ont remplacé par une arme. Cet homme était assis ici tous les jours, à attendre que son fils descende de l'autobus», ajoutait-elle.

Selon la version de la police, des policiers mandatés pour arrêter un suspect ont repéré Keith Scott - qui n'était pas la personne recherchée - dans une voiture sur un parking d'immeuble. Les agents lui ont ordonné à plusieurs reprises de lâcher son arme. «En dépit de ces sommations orales, il est sorti de son véhicule une arme à la main», a relaté le chef de la police.

Contestant cette version, les proches de la victime et les militants des droits de l'homme ont réclamé que la police rende publiques les vidéos qui ont dû être prises par les caméras que les policiers portent sur eux et celle de la voiture de police, ce que la police a jusqu'à présent refusé de faire.

Dans la manifestation de cette nuit, on pouvait voir une pancarte disant : «Publiez les vidéos».