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Jeunes engagés:«Mam, révey twa!»

19 septembre 2016, 21:00

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Jeunes engagés:«Mam, révey twa!»

«Bizin rédibouté !» Assistons-nous à un réveil de la jeunesse mauricienne? Oui, affirment avec conviction trois jeunes engagés, originaires du Sud. Ils militent au sein du collectif Aret Kokin Nu Laplaz, qui s’élève notamment contre l'enlèvement de 17 arpents de la plage de St-Félix du domaine public, le 24 août. Une demande de Judicial Review de cette décision du ministère du Logement et des terres a été déposée en Cour suprême.

Nous avons donné la parole à Sam Gounden, Anshika Sawaram et Mirzaad Ramjan pour qu’ils nous expliquent leur démarche. À leur cause citoyenne, ils ont réussi à rallier des jeunes de Souillac, Chemin- Grenier, Chamouny et Rivière-des- Anguilles. Ils précisent d’emblée qu’ils ne sont pas contre le développement, mais qu’il ne faudrait pas que cela soit au détriment des habitants et des pêcheurs «ki pé gagn zot lavi».

Sam Gounden, de Souillac

 

Son analyse est limpide :  «Des jeunes vont descendre dans la rue et réclamer la démission du gouvernement.» L’étudiant en science politique à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), en France, estime que le réveil des jeunes date des élections de 2014. «C’était un vote de ras-le-bol. On a voté contre une personne. Après deux ans de mandat, ils revivent le même ras-le-bol.»

Les jeunes, fait-il valoir, s’élèvent contre la passivité. «Le ras-le-bol des jeunes, c’est la politique de l’État.» Dont celle du ministère du Logement et des terres de déproclamer une partie de la plage de St-Félix. «Notre mobilisation est essentiellement citoyenne.» L’étudiant qualifie d’«incohérente» cette démarche. «Il n’y a que 10 % des plages, sur 320 km, qui soient publiques. 20 % appartiennent aux hôtels.» Il estime que c’est le Mauricien «moyen» qui profite des plages pour se détendre. «Un citoyen doit se mobiliser contre une chose pareille.»

Le jeune homme fait valoir que la loi est ambiguë. «Est-ce qu’un ministre a le droit de déproclamer une plage publique et de la rendre privée? Dans les textes de loi, il a le droit de proclamer public un site privé et non l’inverse.» Plus important, selon Sam Gounden, beaucoup de touristes pensent que Maurice perd son cachet naturel. «Ils se disent pourquoi dépenser 1 200 euros pour venir à Maurice alors qu’on peut avoir de grands hôtels dans d’autres pays ?» Pour lui, construire des hôtels partout n’est pas «un bon signal» et la démarche économique devrait être intégrée dans le développement local.

Anshika Sawaram, de Chamouny

 

Activiste indépendante depuis six ans, la jeune femme est persuadée que les jeunes comptent se faire entendre. «Ils se révoltent parce qu’on leur enlève leurs droits.» Selon elle, «si les jeunes du SC-HSC contestent certaines choses, c’est à cause de la répression encouragée par l’État». Parlant de la déproclamation d’une partie de la plage de St-Félix, elle dénonce l’«épidémie de smart city». Elle estime que le développement du tourisme n’est pas une raison pour le «développement sauvage». Pour Anshika Sawaram, il existe d’autres façons de rendre le séjour du touriste agréable. «Le touriste cherche le côté rustique. Vivre chez une famille mauricienne et découvrir sa culture. Pourquoi ne pas développer ce genre de tourisme ?»

Mirzaad Ramjaun, de Chemin-Grenier

Pour le vice-président de The Rising qui milite contre les drogues synthétiques, face à la situation actuelle, «bizin rédibouté ». Il fait ressortir que l’engagement des jeunes ne date pas d’hier. En 2002, lors de la construction de l’hôtel Shanti Maurice, à quelques mètres de la plage de St-Félix, le mouvement Pas Touche Nou La Plage avait été créé. «On n’a pas de loisirs. Pas de terrain de foot ou de basket. Notre seule ressource naturelle, c’est la plage.» D’expliquer que «des milliers de Mauriciens fréquentent cette plage les week-ends. Et pendant la semaine, environ une centaine». Quid du développement du pays avec des projets de smart city et d’hôtels ? «On n’est pas contre le développement ni le progrès du pays, car ça aide à la création d’emplois.» Mais pas à n’importe quel prix.