Publicité

La deuxième vie de Vengaï, bébé tigre SDF, dans un refuge unique en France

19 août 2016, 15:21

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

La deuxième vie de Vengaï, bébé tigre SDF, dans un refuge unique en France

 

Ne suis-je pas craquant avec mes grand yeux dorés, ma robe rayée et mes quenottes acérées? Ce bébé tigre sauvé des griffes de dealers de région parisienne coule désormais des jours heureux dans la Loire, dans un rare refuge pour fauves saisis par la justice.

Maigre et dénutri à son arrivée le 18 juin, Vengaï est désormais un gros «chaton» joueur de quatre mois et plusieurs dizaines de kilos qui batifole dans les herbes de son enclos et mordille allègrement les chevilles de son soigneur.

«S’il le voulait, ce chenapan pourrait déjà faire très mal avec ses petits crocs pointus», confie à l’AFP Pierre Thivillon, directeur du Parc zoologique de Saint-Martin-La-Plaine (Loire), qui a créé voici près de dix ans l’association Tonga Terre d’Accueil à l’origine de ce sanctuaire unique en son genre en France, selon lui.

Vengaï va bientôt rejoindre l’une de ses voisines qui deviendra pour un temps sa maman: une tigresse récupérée dans un piteux état à Beyrouth, ou une autre saisie dans un cirque.

Ce bébé tigre avait été la proie de dealers de la région parisienne qui monnayaient des selfies avec lui. «De nos jours, les fauves ont la cote dans les banlieues», remarque M. Thivillon. Vengaï avait ensuite été abandonné par les trafiquants dans un carton au bord d’une route.

D’où venait-il ? «Peut-être d’un cirque... Certains font reproduire leurs animaux pour vendre les bébés au marché noir», déplore le directeur. «D’autres, sans certificat de capacité et dans l’illégalité, doivent se défaire de leurs animaux, qui sont saisis». De même pour les particuliers sans certificat.

C’est l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS) qui avait confié le bébé tigre à l’association Tonga, du nom d’un hippopotame d’un cirque itinérant sauvé dans la Drôme par M. Thivillon. L’animal avait pu être accueilli par la suite dans une réserve sud-africaine grâce à la Fondation Brigitte Bardot.

«Ce sauvetage a été le point de départ de l’aventure un peu folle de Tonga en 2007. Depuis, nous nous limitons aux félins et aux primates», sourit-il.

Quatre structures érigées hors de l’espace du zoo qui compte un millier d’animaux, dont douze gorilles, accueillent ces pensionnaires saisis par les autorités et qui seraient condamnés, sans Tonga, à l’euthanasie.

Les bâtiments ont été financés «par le conseil général de la Loire, 30 millions d’amis et la Fondation Bardot», explique-t-il.

Un Daktari à la française

Une fois recueillis, les nouveaux arrivants, souvent mal en point, sont intégrés petit à petit dans leur groupe social.

L’objectif ? Les détacher de l’imprégnation humaine et les placer dans des espaces zoologiques en Europe ou ailleurs. «Mais difficile de les recaser. La politique des zoos est aujourd’hui de favoriser la reproduction d’espèces menacées. Nos animaux ne les intéressent guère...»

«Quand on ne peut pas les placer, on les garde». Tonga est un des très rares refuges en Europe à recueillir ce genre d’animaux», explique M. Thivillon, qui, à 73 ans, vit toujours pour sa passion.

Son épouse et lui cohabitent d’ailleurs, dans leur maison au sein du zoo, avec... une dame gorille, Digit, née voici 18 ans dans le parc, et un chimpanzé baptisé Thaïs.

Digit dort chez eux la nuit et ouvre chaque matin les volets avec sa «maman» adoptive. Thaïs l’accompagne partout dans la journée.

«Avec ma femme, on a choisi il y a 42 ans d’élever des singes et de ne pas faire d’enfants. Une vie de rêve pour nous, mais aussi un esclavage. On n’a jamais quitté le parc, ouvert en 1972, même une demi-journée»: «sept jours sur sept» à la tête de leur Daktari à la française.

La nourriture des pensionnaires du refuge et du zoo, qui reçoit quelque 160.000 visiteurs par an et compte 110 espèces animales, «ne nous coûte rien. Nous collectons les invendus dans les supermarchés, viande, légumes, fruits, yaourts...», relève Pierre Thivillon, patron d’une quarantaine de salariés, dont un vétérinaire.