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Juan Carlos Fernandez Zara, CEO du Mauritius Institute of Directors : Le secteur public et l’Afrique dans sa ligne de mire

2 juillet 2016, 10:38

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Juan Carlos Fernandez Zara, CEO du Mauritius Institute of Directors : Le secteur public et l’Afrique dans sa ligne de mire

 

Il remplace depuis peu Jane Valls à la tête du Mauritius Institute of Directors. L’un des objectifs de ce Suisse à moitié espagnol : améliorer le gouvernement d’entreprise.

À 40 ans, Juan Carlos Fernandez Zara, présente un curriculum vitae étoffé. Car après des années d’études de droit et rompu à une longue pratique du droit commercial, il a travaillé pour l’International Finance Corporation pendant huit ans et pour la Banque interaméricaine de développement pendant trois ans. Et, lors de notre prise de contact, on se rend compte qu’on est loin de l’étranger arrogant qui veut tout imposer. Son approche serait plutôt celle de proposer son expertise, de suggérer les meilleures pratiques et de s’imprégner des réalités du pays pour travailler en partenariat avec son interlocuteur et atteindre les objectifs fixés.

Ce natif de Genève aimant bien l’idée de justice et de droiture, a opté pour des études de droit, faisant sa licence dans sa ville d’origine, sa maîtrise en Allemagne et un Masters en droit européen en Espagne. S’il a plaidé au criminel, sur les conseils avisés de son maître de stage devenu son mentor, il s’est surtout orienté vers le droit commercial.

À la fin de son brevet, il a toutefois réalisé que ce type de droit était somme toute limitatif et qu’il était en quête d’autre chose. Il a donc embrayé avec un Masters en Business Administration. «J’ai eu envie de me diriger vers le domaine de la gestion et le MBA m’a permis de comprendre le pourquoi du comment.»

Embauché comme conseil légal à Ernst & Young, il décide, après un moment, de quitter ses frontières. Son profil combinant le juridique et la gestion intéresse l’International Finance Corporation qui est le volet secteur privé de la Banque mondiale. Cette compagnie le recrute pour agir en tant que Senior Programme Manager pour le gouvernement d’entreprise. C’est dans les Balkans qu’il est envoyé. Ainsi, pendant quatre ans, il gère des programmes régionaux de bonne gouvernance et de développement, financés par les États membres. Il couvre cinq pays et interagit avec leurs exécutifs en les aidant à réviser des lois ou à en adopter d’autres au besoin, procurant des formations aux entreprises et à d’autres partenaires avec, pour objectif, de leur faire mieux appréhender la gouvernance et obtenir au final une autonomie financière. «J’ai essayé de planter des graines et de leur donner le plus de chance possible de fleurir», explique-t-il. Il a aussi mis sur pied des formations avec les universités et les médias.

Au bout de quatre ans, c’est au Vietnam qu’il est envoyé pour couvrir la région allant de l’Inde à la Papouasie-Nouvelle-Guinée. Son épouse Andreea, qui détient un doctorat en changements institutionnels, l’y accompagne avec leur fils de 10 ans. Il réplique ce qu’il a fait aux Balkans mais toujours en s’imprégnant des réalités locales.

Juan Carlos Fernandez Zara se laisse débaucher après quatre ans par la Banque interaméricaine de développement qui a mis au point un nouveau système de prêts aux entreprises. Son rôle à lui est d’instituer un cadre avec des normes à être respectées et comment aider ces entreprises à s’améliorer. Bien que basé à Washington D.C, son champ d’application comprend l’Amérique Latine et les Caraïbes. Au bout de trois ans toutefois, il se lasse car Washington D.C lui rappelle trop la Suisse avec son côté ordonné. C’est alors qu’il entend parler du poste qui sera vacant à la tête du Mauritius Institute of Directors (MIoD) à Maurice.

«J’avais entendu parler de Maurice depuis des années et ce qui m’intéressait, c’était le côté pluriculturel. J’avais toujours travaillé dans de grands pays et avec de grandes structures et là, j’avais la possibilité de mettre en pratique mon expertise dans un petit pays. Je me suis dit que vu la taille de l’île, peut-être que je réussirai à avoir plus d’impact dans l’île et d’ouverture à l’Afrique car c’est un continent où j’ai beaucoup à apprendre. Vu l’accès facile et le fait que tout le monde connaisse tout le monde, j’ai estimé qu’il y aurait sans doute une facilité théorique dans la possibilité d’accomplir des choses.»

C’est ainsi qu’il a obtenu le poste de Chief Executive Officer au départ de Jane Valls. Vu de l’extérieur, le MIoD, qui existe depuis huit ans, pourrait donner à penser qu’il s’agit d’une coterie. Juan Carlos Fernandez Zara est conscient de cette fausse perception qu’il veut modifier. «En fait, le MIoD a mis du temps à se constituer. Vu mon expérience internationale, je voudrais non seulement améliorer le gouvernement d’entreprise mais aussi étendre la base de nos services.» Il entend par là augmenter le nombre de membres individuels se montant, valeur du jour, à 1 200 mais aussi à tendre la main au secteur public pour améliorer les normes. Sans compter le monde universitaire et les médias.

«Il n’est pas difficile d’avoir des politiques. Le plus dur, est de voir ce qu’on en fait. Certaines entreprises dans le monde mettent en place des lois par obligation internationale mais ne les appliquent pas. L’application est importante. Le MIoD a un rôle important à jouer et veut être un agent de changement pour aider l’économie mauricienne à atteindre ses objectifs. Nous devons aussi revoir nos offres et les adapter à nos clients. De plus, comme Maurice veut se positionner comme pont vers l’Afrique, le MIoD peut aussi l’aider à ce niveau car nous sommes membres de l’African Corporate Governance Network. Maurice pourrait être le leader en temps réel de pratiques de bonne gouvernance vis-à-vis de l’Afrique. J’estime que les opportunités sont grandes.» Tout cela, précise-til, sera sujet à l’approbation de son conseil d’administration.

Il visite actuellement tous les membres de l’institut pour avoir une meilleure compréhension de leur situation. Son contrat étant de trois ans, il n’écarte pas la possibilité d’impliquer également les petites et moyennes entreprises. «D’ici six mois, je crois qu’il y aura des changements d’envergure.»

La taille de l’île et le fait que les gens se connaissent ne sont-ils pas des facteurs décourageants, même aux meilleures intentions du monde ? Il ne le pense pas. «En Suisse, en matière de gouvernement d’entreprise, je contribuais à huiler une machine déjà ultraperformante. J’ai eu envie de connaître, d’apprendre et de partager et je le fais sérieusement mais sans me prendre au sérieux. Tant que c’est le cas, il n’y a pas de risque que je me lasse.» Rendez-vous donc pour un bilan dans trois ans.