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Venezuela: le référendum anti-Maduro avance, sous la menace

11 juin 2016, 07:56

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Venezuela: le référendum anti-Maduro avance, sous la menace

 

Le référendum de l’opposition pour révoquer le président vénézuélien Nicolas Maduro a franchi une nouvelle étape vendredi, mais il est sous le coup d’une double menace : une plainte pour «fraude» et une suspension en cas de violences.

«La validation aura lieu dans les bureaux régionaux (des autorités électorales) du lundi 20 au vendredi 24 juin», a déclaré la présidente du Conseil national électoral (CNE) Tibisay Lucena lors d’une conférence de presse vendredi.

Mais elle a immédiatement prévenu : le processus sera interrompu en cas de violences. Une gageure dans un des pays les plus violents du monde, où se multiplient les heurts entre police et manifestants ainsi que les pillages liés à la pénurie de nourriture.

«Nous voulons être clairs : la moindre agression, trouble (de l’ordre) ou incitation à la violence entraînera la suspension immédiate du processus jusqu’au rétablissement de l’ordre», a-t-elle ajouté.

Pourtant, nombre d’experts estiment que le référendum est la seule «soupape» qui pourrait faire retomber la pression.

Après avoir rassemblé début mai 1,8 million de signatures en faveur de cette consultation, la coalition d’opposition, réunie sous le nom de Table pour l’unité démocratique (MUD, centre droit), majoritaire au Parlement, exigeait du Conseil national électoral (CNE) la mise en œuvre des étapes suivantes de ce processus long et complexe.

Un mois plus tard, le CNE a fini par valider mardi 1,3 million de signatures, soit largement plus que les 200.000 requises pour enclencher le processus.

L’opposition attendait désormais du CNE les dates pour que les signataires puissent confirmer leur choix, en personne et avec leurs empreintes digitales.

Après ces étapes, la procédure impose de réunir quatre millions de signatures en trois jours pour avoir le droit d’organiser le référendum lui-même où il faudrait dépasser le score obtenu par M. Maduro en 2013 (7,5 millions de votes) pour qu’il soit révoqué.

Réunion de l’OEA

L’opposition de centre-droit est engagée dans un contre-la-montre, car si cette consultation a lieu d’ici le 10 janvier 2017, elle peut provoquer de nouvelles élections. Sinon, M. Maduro serait simplement remplacé par son vice-président.

Et les chavistes (du nom de l’ex-président Hugo Chavez, 1999-2013) n’entendent pas le laisser prospérer.

Un peu plus tard vendredi, Jorge Rodriguez, nommée par le président vénézuélien pour surveiller le processus d’examen des signatures, a annoncé qu’il allait porter plainte devant le Tribunal suprême de justice (TSJ) pour «fraude».

Selon lui, des irrégularités ont été constatées lors du recueil des signatures, des mineurs ou des personnes décédées ayant été comptabilisées.

Vendredi, l’Organisation des Etats américains (OEA) a convoqué pour le 23 juin une session extraordinaire de ses 34 pays sur la situation du Venezuela.

A l’ordre du jour de cette réunion : un récent rapport du secrétaire général de l’organisation Luis Almagro où il affirmait que le pays connaît une «altération de son ordre constitutionnel» qui affecte la démocratie.

M. Almagro s’est dit vendredi sur Twitter «confiant dans les discussions et les décisions qui émaneront de la session».

Le Conseil permanent peut notamment décider de suspendre l’adhésion du Venezuela à l’OEA.

Avant cette session extraordinaire, l’OEA organise à partir de lundi son Assemblée générale à Santo Domingo, en République dominicaine. Le chef de la diplomatie américaine John Kerry a annoncé vendredi qu’il s’y rendrait les 13 et 14 juin.

Si le Venezuela ne figure pas à l’ordre du jour, le sujet sera «certainement» évoqué lors de l’Assemblée, a indiqué le porte-parole du secrétaire d’Etat, Mark Toner.

'Les gens ont faim'

Le Venezuela est au bord de l’implosion, déchiré par la guerre politique entre le Parlement, contrôlé par l’opposition, et le gouvernement socialiste pro-Maduro, dans un climat d’exaspération populaire lié à l’effondrement économique de ce pays pétrolier.

Si les manifestations à l’appel de l’opposition ne sont guère massives, des explosions de colère contre le gouvernement et le président socialiste (blocages, pillages, etc) se multiplient de manière apparemment spontanée à travers le pays.

«Les gens sortent piller car ils ont faim. On ne trouve rien», a déclaré à l’AFP Robert Arcila, un vendeur d’oeufs de 22 ans qui se trouvait jeudi près d’un camion chargé de fromage et de saucisses dévalisé dans la favela de Petare.

Entre jeudi et vendredi matin, deux autres camions et une dizaine de commerces ont été vidés dans cette favela, une des plus grandes d’Amérique latine, a constaté l’AFP.

«Au Venezuela, toutes les crises se conjuguent», estime Erika Guevara, directrice pour les Amériques d’Amnesty International.