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Berlin accuse Moscou d'«instrumentaliser» un fait divers sexuel

28 janvier 2016, 15:26

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Berlin accuse Moscou d'«instrumentaliser» un fait divers sexuel

 

Un fait divers impliquant une adolescente germano-russe, dont la famille affirme qu?elle a été violée par des migrants en Allemagne, a tourné à l?incident diplomatique mercredi, Berlin accusant Moscou d?"instrumentaliser" l?affaire après des critiques russes.

"Nous avons en Allemagne une justice indépendante (...) et cette justice doit travailler dans le calme, sans ingérences extérieures injustifiées, il est même interdit d'instrumentaliser politiquement ce processus", a dit le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Seibert.

Il répondait aux critiques la veille du chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, à l'encontre de la police allemande. Ce dernier lui avait reproché d'avoir "balayé l'affaire sous le tapis", d'avoir "très longtemps dissimulé" des informations sur le dossier de l'adolescente.

Cette dernière n'a "pas disparu de son plein gré pendant 30 heures", a dit le diplomate, remettant en cause ainsi la thèse privilégiée par les enquêteurs allemands.

Le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a de son côté enjoint Moscou à ne pas utiliser ce fait divers à des fins de "propagande politique pour attiser un débat sans aucun doute difficile, le débat sur les migrants".

- Détournement de mineur -

La passe d'armes diplomatique intervient dans un contexte de relations bilatérales et russo-occidentales de tensions, alimentées notamment par les sanctions contre Moscou en raison de la crise ukrainienne et les divergences sur la guerre civile en Syrie.

Au coeur de la polémique, la disparition le 11 janvier 2016, pendant trente heures à Berlin, d'une jeune fille de 13 ans, Lisa F. Selon ses proches et sa première déposition, elle aurait été violée et battue par trois personnes de type "méditerranéen".

Or, la police a assuré qu'après enquête et examen médical, il est établi qu'il s'agissait d'une disparition volontaire, que les rapports sexuels ont été "consentis" et que Lisa avait déjà agi de la sorte.

Le parquet a néanmoins ouvert une enquête pour détournement de mineur.

La version de la police a été rejetée par les proches de Lisa F., qui accusent les policiers d'avoir fait pression sur l'adolescente pour qu'elle modifie son récit.

Certains médias russes ont repris ces allégations, laissant entendre que les policiers ont voulu camoufler les faits afin de ne pas mettre en difficulté la politique généreuse à l'égard des migrants de la chancelière Angela Merkel.

M. Lavrov lui-même a dit mardi "espérer" que face aux problèmes liés aux migrants en Europe, il n'y avait "pas de tentatives d'enjoliver la réalité à des fins politiques".

Cette affaire survient après l'immense controverse suscitée par les agressions sexuelles en série commises contre des femmes au Nouvel An à Cologne et pour lesquelles des migrants d'Afrique du Nord principalement sont soupçonnés par la police.

Depuis ces évènements, Mme Merkel, qui refuse de fermer son pays aux demandeurs d'asile, doit faire face à une opposition redoublée dans son camp conservateur et au scepticisme croissant de l'opinion publique.

Revenant sur les accusations de M. Lavrov, le ministère allemand des Affaires étrangères a répondu par le sarcasme.

"Nous nous réjouissons du grand engagement du gouvernement russe envers la transparence et l'objectivité de la justice pénale", a dit à la presse le porte-parole de la diplomatie allemande, Martin Schäfer.

- Manifestation d'extrême droite -

Il a aussi critiqué le comportement des médias russes dans ce dossier, soulignant que la justice et la police berlinoises avaient tout sa confiance, contrairement à "certains médias russes qui ont couvert ce thème ces derniers jours".

Très présents dans les médias en Russie, les proches de Lisa F. ont participé en Allemagne à des rassemblement de contestation avec le parti néonazi allemand NPD, l'extrême droite s'étant aussi saisie du cas de l'adolescente.

La communauté germano-russe a aussi organisé des manifestations le week-end dernier ayant réuni des centaines de personnes en Allemagne, certaines marquées par des slogans racistes, selon les médias allemands.

Après la chute de l'URSS, plusieurs centaines de milliers de personnes ethniquement allemandes et installées dans les républiques soviétiques, surnommées "Les Allemands de Russie", ont pu émigrer en Allemagne et en obtenir la nationalité. Cette communauté, très soudée, reste étroitement liée à son ancienne patrie, dispose de journaux en russe et suit de près les médias en Russie.