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Raz-de-marée: un avant-goût de ce qui attend nos hôtels…
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Raz-de-marée: un avant-goût de ce qui attend nos hôtels…
Mettre un frein aux structures en dur mais aussi adopter le recul stratégique pour mieux nous protéger contre les raz-de-marée… C’est du reste ce que proposent certains écologistes, suivant le passage du cyclone Freddy
Les rafales du cyclone tropical intense Freddy ont provoqué une montée des eaux sur le littoral nord et est, affectant les établissements hôteliers de la région. Paillottes, transats, decks inondés, chaises et tables emportées… des images impressionnantes ont été diffusées sur les réseaux sociaux. Comment ? Pourquoi ? Bilan.
Du côté de l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’île Maurice (AHRIM), si on fait ressortir qu’il n’y a pas eu une estimation des dégâts causés par le cyclone, néanmoins, la plage et quelques restaurants ont été affectés. L’hôtel Ambre, situé sur la route côtière de Palmar, n’a pas échappé à la furie des vagues. «Une partie de la plage a été endommagée par les fortes marées causées par le cyclone. Nos équipes sont sur le terrain et effectuent en ce moment même (NdlR,hier) un nettoyage. Nous sommes confiants que cette partie de plage sera remise sur pied dans les prochains jours. Le reste de la plage sera de nouveau praticable d’ici cette après-midi (NdlR, hier)», précise la direction de Sunlife dans un communiqué émis hier.
L’hôtel explique également que «tous les clients séjournant à l’hôtel Ambre sont à l’abri et n’ont pas été redirigés vers d’autres établissements hôteliers. L’hôtel reste ouvert et accueille également les clients en arrivée comme à son habitude». Et d’ajouter qu’un protocole strict est suivi chez Sunlife lors de passages de cyclones pour que les mesures de sécurité soient bien prises. «Tous nos resorts étaient bien préparés pour le passage de Freddy.»
L’hôtel Constance Belle Mare Plage, situé dans l’Est, n’a pas été épargné. «Nous n’avons heureusement pas rencontré de détériorations, à part les paillotes se trouvant au bord de la plage qui ont connu des dégâts mineurs (…) Toutes les opérations ont déjà repris le cours normal de leurs activités», indique-t-on du côté du groupe Constance, Hotels & Resorts. On souligne que dès l’annonce des conditions cycloniques, toutes les mesures appropriées ont été prises pour assurer la sécurité des résidents et des employés.
Néanmoins, avec nos plages inondées, est-ce que Freddy est annonciateur de ce qui nous attend avec le changement climatique ? «Bien qu’il se soit – fort heureusement – tenu à une bonne distance de nous, Freddy a bien démontré ce qui nous attend. Certes, le passage du cyclone au plus près coïncidait avec la marée haute, mais l’importante étendue de la submersion marine est un signal fort. Un passage plus proche, une vitesse moins rapide et/ou un plus grand diamètre auraient été catastrophiques», affirme Adi Teelock, militante écologiste. Revenant sur le cyclone Carol en 1960, elle explique que celuici avait causé une submersion marine extrêmement importante.
«Mais ce qui est différent aujourd’hui et qui rend la situation potentiellement désastreuse est l’ampleur des constructions en dur sur les côtes. C’est un fait connu que non seulement l’érosion a continuellement grignoté nos plages de façon conséquente mais aussi que les structures en dur – murets, murs, bâtiments, routes – augmentent la force des vagues (et donc l’impact) au lieu de les atténuer ou les dissiper.» Àl’inverse, une végétation adaptée, les coraux et récifs, les herbiers marins, les mangroves atténuent la force des vagues. «Le souci, c’est que cette nature a été souvent enlevée et parfois remplacée par des structures en dur et/ou une végétation non adaptée.»
Yan Hookoomsing d’Aret Kokin Nu Laplaz (AKNL), estime également que le pays a été témoin d’un avant-goût de ce qui nous attend dans le futur. «Les raz-demarée dans le Nord et l’Est, ce n’est rien du tout.» Selon lui, il sera impossible d’arrêter la puissance des vagues. Raison pour laquelle il faudra accepter complètement un changement dans la manière de construire sur les côtes. «À La Réunion, ils font le recul stratégique. Reculer pour mieux protéger. Car ce n’est pas une construction en dur qui arrêtera l’érosion de la plage. (…) Il faudra apprendre à vivre avec la nature.» En effet, Maurice a des barrières naturelles comme les zones humides, les dunes et les coraux qui aident l’écosystème. «La manière de penser au littoral et la nature doivent changer. Graduellement, la plage disparaîtra. Kot inn arivé, ki so kanpman, ki so lotel bizin rékilé.»
L’écologiste préconise d’utiliser les données scientifiques pour des modélisations et de les rendre publiques. «En 2025, 2030, 2035 on saura ce qui adviendra au High Watermark pour prendre les meilleures décisions. L’avancée de la science permet de faire des modélisations.Fer popilasion konpran. Prozet zot dan 10 an.» Selon lui, il est clair qu’avant une alerte cyclonique de classe 4, davantage de campements, maisons et hôtels sur le littoral seront submergés. «La nature est gentille avec nous.Li pou anpiré.»
Quid du secteur du tourisme, pourrait-il être menacé à l’avenir ? Pour Adi Teelock, le tourisme prend déjà un mauvais coup avec des plages de sable ou autres côtes naturelles qui disparaissent. Elle estime que les remplacer par des revêtements rocheux ou autres structures en dur ne font qu’enlaidir le paysage, retarder l’échéance ou pire, aggraver la situation.«Les breakwaters mal conçus ont également démontré les mêmes effets. Certaines structures devraient vraiment être enlevées pour être remplacées par une “infrastructure” verte. Mais les autorités préfèrent encore enfouir la tête dans le sable au lieu de prendre des décisions courageuses pour éviter des désastres.»
Yan Hookoomsing estime que c’est une côte naturelle et verdoyante qui intéresse le touriste. Il argue que pour l’avenir du tourisme, il faut arrêter de bétonner le long du littoral. «Nous sommes habitués avec l’érosion. Pour nous c’est normal. Mais le touriste, lui, est choqué.»
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